Fév 142014
 

Je suis en général très réservée face aux féministes qui appellent au durcissement des peines de prison, en particulier pour le viol, et pour dire vrai, je suis réticente tout court au durcissement des peines de prison, voire à la prison tout court.

Essayons de poser les choses. Les institutions policières et judiciaires sont à l'image de notre société et traversées, entre autres, de sexisme et de racisme. On sait par exemple que beaucoup de viols sont correctionnalisés (de crime, ils deviennent des délits qu'on ne juge plus aux Assises) pour plusieurs raisons dont l'une est que face à un juré populaire un violeur s'en sort mieux qu'une agresseur sexuel face à un tribunal correctionnel. Arriver à correctionnaliser un viol car on sait que sinon le violeur s'en sortira mieux , il fallait oser, on l'a fait.  Les crimes contre les femmes sont en général appelés de mille euphémismes "crime passionnel", "vie de couple tumultueuse" (pour un mari qui a torturé sa femme 30 ans). Si autant de victimes refusent de porter plainte c'est qu'elles savent très bien qu'elles risquent d'être mal accueillies au poste de police, mal accueillies au tribunal. Si certaines disent que ce qui a suivi la plainte a été pour elles comme un deuxième viol judiciaire, cela n'est pas sans raison.

Et de l'autre côté, nous savons que nous sommes également face à une justice de classe et raciste. Même si cet article comporte des failles (on ne peut se fier à quelques cas pour en conclure quoi que ce soit),  il démontre néanmoins magistralement qu'on a eu besoin - et l'institution judiciaire est en cause - comme certaines féministes aurais je envie de dire - d'inventer des sexismes propres aux racisés. Les racisés ne font pas des viols collectifs mais des tournantes, ils ne tuent pas leur femme mais commettent des crimes d'honneur. Le meurtre de Sohane Benziane fut un raz de marée politique en 2002 avec la plus importante marche jamais faite contre "la violence machiste des quartiers".  En 2008,  un député Demange, se suicida après avoir assassiné sa femme, il y eut une minute de silence à l'assemblée nationale.  En 2007 un homme décapita sa femme dont un psy dit "Il ne faut pas dire du mal de Nicole Cousin, mais" (oui on parle bien d'une femme décapitée au couteau). Ces jours ci nous avons assisté au procès d'un homme accusé de tortures et d'actes de barbarie sur sa femme ; le crime de viol conjugal n'a pas été retenu. je vous laisse imaginer ce qu'on aurait entendu et ce qui aurait été dit si ces 3 dernières personnes avait été d'origine immigrée (en particulier dans la décapitation au couteau cela aurait été magnifique).
Et donc pas plus que la société n'est neutre en matière de sexisme, elle ne l'est en matière de racisme et cela se ressent évidemment dans les tribunaux et les peines administrées. Je vous en avais déjà parlé , aux USA les femmes noires violées portent encore moins plainte que les blanches ; elles savent que l'accusation de viol a servi (depuis la fin du XIXeme siècle)  à enfermer, arrêter, torturer et assassiner des hommes noirs. Dans un de mes articles précédents, je soulignais également le racisme subi par une femme noire en banlieue si elle s'avise de porter plainte (on ne la croit tout simplement pas car "elle n'a pu être agressée par autre chose que des noirs et des arabes et ceux ci ne l'agresseraient pas vu qu'ils n'agressent pas dans leur propre groupe ethnique").

Il ne s'agit pas - je vous vois venir -  de délivrer un brevet du mérite aux "arabes qui violent leur femme" mais de tenir compte de ces faits là - sexisme et racisme - avant de parler de quoi que ce soit.

Quel doit être le but de la justice ? Quel est le but de la peine de prison ? On sait - c'est un constat maintes fois fait - que les peine de prison lourdes - au delà de 15 ans - détruisent le prisonnier et qu'il sera extrêmement difficile de le réinsérer ensuite car il sera cassé.
Que cherchons nous via la prison ?
Est ce la réparation du préjudice vécu par la victime ? Mais qu'est ce qui pourrait réparer ? La victime souhaite une seule chose ; que tout redevienne comme avant et cela ne peut lui être accordé.
Est ce la vengeance ?
Est ce l'idée de punir ? Doit-elle s'accompagner d'une idée d'une possible réinsertion ?
On ne cesse de nous dire qu'il y a un faible taux de récidive en matière de crimes sexuels. On oublie de nous dire que seuls 10% des viols font l'objets d'une plainte et que seuls 10% de ces 10% font l'objet d'une condamnation.  Il serait donc beaucoup plus honnête de nous dire qu'on n'a aucune idée du taux de récidive.
Est ce l'idée d'écarter un temps un humain de la société ?
Doit on investir de l'argent à sa réinsertion ?

Soyons clairs, nous ne sommes pas prêts aujourd'hui à faire autrement qu'avec la prison. Nous ne sommes pas prêts à dépenser de l'argent dans des peines alternatives (et pourtant la prison coute très cher), nous sommes encore moins prêts à dépenser de l'argent dans l'éducation. Nous savons pourtant que la prison appelle la prison. Nous savons également que beaucoup de détenus en sortent sans avoir rien compris, sans voir rien appris. Quand j'entends que des mineurs ont été condamnés  à X années pour un viol collectif et que leur avocat se dit inquiet car pas un n'a compris le verdict ni l'acte commis, je suis inquiète et je n'oublie pas. Je me demande comment on peut se satisfaire de cela.
j'avais évoqué dans un précédent texte le problème de la sanction au collège qui renforce les comportements virils des garçons. Pour être clair, la société commande à un garçon (via les rôles sociaux de sexe, le genre donc) de se comporter d'une telle manière. Il le fait ; il va être bagarreur par exemple. On le punit pour cela. La punition ne l'aide pas à changer son comportement mais va le renforcer car lui apporter du prestige auprès de ses camarades. Et vu qu'on approuve au fait pour un homme le fait de se bagarrer, la punition n'a aucune logique. Il en est strictement de même pour la prison ; au lieu de nous demander pourquoi il y a autant de prisonniers sont des hommes (on peut arguer que la justice est plus sévère avec les hommes ; c'est fort possible mais il y a aussi une socialisation qui pousse les hommes à adopter des comportements en apparence valorisés mais aussi réprimés), on préfère continuer à enfermer sans cesse plus, sans cesse mal.

Alors suis je pour les peines de prisons lourdes pour le viol ? (puisque c'est la question qui m'a été explicitement posée il y a peu). cette question ne veut rien dire en soi à moins de vouloir une justice automatique qui attribue des peines en fonction du crime commis et non plus du cas qui se présente à elle.
Veux je des peines de prison lourdes ? Mais pourquoi faire ? Est ce que cela va dissuader qui que ce soit ? Est ce que cela empêche la récidive ?

ps ; précisons de suite que vous ne connaissez rien de ma vie. donc l'argument "si tu avais vécu cela ou cela, tu serais pour la prison à vie", ne fonctionnera pas.

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  33 réponses sur “Féminisme, criminalité et prisons”

  1. Ben c'est clûre que Valérie se prend pas pour une merde donc forcément... En même temps c'est terrible pour elle ce manque de lucidité sur elle-même hein. ^^

    • promis je vais essayer la lucidité et me prendre pour une merde (je sens que cette phrase manque de la plus élémentaire logique).

      • T'y arrivera pas Valérie, la lucidité... Penses-tu... La lucidité pas moins ! Autant demander a Sarkozy de faire de l'éducation populaire, autant te demander d'être honnête, dans un autre univers, dans une autre réalité alternative pitêtre mais même là, on sent que c'est pas gagné ! ^^

        Nan le truc qui serait à ta portée ca serait une sorte de balançoire-humaine, de karma de viande-séchée, une corde, une poutre, le début d'une aventure tu vois, tellement plus dans tes "capacités", by the way. ^^

        ps : si vous pensez que ce message est une proposition de bondage go vous pendre. 🙂

    • Très constructif bravo.

  2. C'est tellement oxygénant de lire ce genre d'article. Je ne comprends pas qu'en 2014 on n'ait toujours pas compris que la prison n'est pas une solution mais un problème. Relire Foucault relire Foucault relire Foucault. Je honnis tous ces gens de droite (et pas seulement) qui critiquent le soi-disant "laxisme" de ceux qui veulent améliorer le système carcéral, repenser les peines de prison etc.

  3. Bonjour,

    Et merci pour cet article. Je suis tout à fait d'accord sur la perception racialisée des violences faites aux femmes dans la société française, néanmoins un petit correctif: j'ai entendu une fois Danièle Bousquet (on peut discuter totalement ses opinions sur la prostitution, elle n'en reste pas moins une députée sensibilisée plus que d'autres aux questions de violences faites aux femmes) revenir sur les circonstances de la minute de silence lors du suicide, précédé d'un meurtre, de Demange. Au départ, seule la mort du député a été annoncée à la présidente de séance ce jour-là. L'Assemblée nationale a dans ce cas l'habitude de faire une minute de silence. C'est seulement après que les députés ont appris que leur collègue était coupable d'un homicide.
    Voilà, cette info vaut ce qu'elle vaut. Cela dit, les réactions qui suivirent furent quand même particulièrement empathiques pour Demange: http://www.lepoint.fr/actualites-societe/2008-11-17/un-depute-ump-se-donne-la-mort-apres-avoir-tue-sa-compagne/920/0/292036

  4. En te lisant, me vient la réflexion que tant qu'on continuera, conformément à la culture du viol, de considérer que les violeurs sont des fous dangereux à écarter de la société, et non pas des gens comme nous, et peut-être même nous, qui sait ? forcément, le point de vue sur la prison ne peut pas évoluer.

    Il me semble que la fonction principale de la prison est de protéger la société contre des individus dangereux. Or, je crois que dans l'imaginaire des gens, c'est une vision plutôt super archaïque, la prison doit punir, venger. L'expérience doit être la plus dure possible, on espère que le condamné va "en chier", qu'il se fera agresser parce que c'est tout ce qu'il mérite.

    Enfin, loin de moi l'idée de défendre ceux qui souhaitent alourdir au maximum les peines de prison, simplement, il ne me semble pas illogique que, dans le cadre d'une société sexiste et raciste dans laquelle les violences faites aux femmes sont minimisées et les victimes culpabilisées, le souhait de voir les peines alourdies serait plutôt lié au désir de voir la gravité de ces violences davantage reconnues.

    • oui c'est bien évidemment dans ce sens que les féministes l'entendent ; mais est ce que la gravité d'un crime est proportionnelle au nombre d'années de prison qu'on aura ?

  5. Bonjour,

    et merci pour cet article.

    Pour ce qui est de la réflexion sur la place de la prison dans la société, sur le recours à la punition, et les dogmes sur lequel il repose, on peut lire aussi le très stimulant "Pourquoi faudrait-il punir?" de Catherine Baker.

  6. Bien sûr, c'est un débat technique très complexe, mais voici les points qui me dérangent avec notre système carcéral actuel :

    1) Le fait qu'on mélange des petits délinquant et des criminels violents sans considération pour le durcissement que vont subir les premiers
    2) Le principe de prison en tant que simple privation de liberté; la peine de prison signifie dette envers la société et danger pour ses membres, selon quelle logique le détenu devrait-il être entretenu par ladite société ? Ils pourraient continuer à en faire partie en travaillant pour payer leur peine, sans abandonner la mise à l'écart carcérale. Ainsi la prison se détacherait d'un huis-clos hors du monde.
    3) L'insuffisance de l'accompagnement psychiatrique visant à faire comprendre sa peine au détenu

    Après, je suis un peu hésitante sur un point, on lit souvent que les violeurs ne sont pas des monstres, qu'ils sont Monsieur-tout-le-monde...Si par là, on entend qu'ils ont souvent une apparence normale, qu'ils sont intégrés et peuvent paraître tout à fait sympathiques en surface, je suis d'accord. Mais je n'arrive pas à croire qu'ils peuvent ignorer le mal qu'ils font, je pense que ceux qui prétendent avoir violé sans en avoir confiance sont des lâches qui refusent de se voir comme le méchant de l'histoire. Qui le voudrait ? N'empêche qu'il faut être cruel et impitoyable pour violer sa copine/belle-fille/collègue. Je n'arrive vraiment pas à croire les témoignages du style "Je me suis rendu compte que j'avais peut-être forcé ma fiancée, je me suis senti minable, etc" : tant mieux s'ils décident de voir les choses en face, mais je ne crois pas à cet état de béatitude qui rendrait subitement aveugle à la souffrance d'autrui.
    Un individu capable d'autant de cruauté peut-il redevenir inoffensif ? Je ne sais pas. Dans ce genre d'affaire, les violeurs ont souvent plusieurs victimes à leur actif...Le passage à l'acte en la matière résulte d'une déchirure, dans l'intériorisation de la morale (par morale, j'entends tout simplement la différence entre gentil et méchant), assez irréversible.

    • parce qu'on éduque les gens à penser qu'un violeur c'est un type qui viole une fille en lui infligeant une dechirure vaginale sur 15 centimètres, qui la menace d'un couteau et qui ressemble à Francis Heaulme.
      donc quand tu es un beau gosse, bien intégré, qui viole une fille semi inconsciente car elle est soule, la société entière te dit que tu n'as pas violé.
      et non cela n'est pas un faux fuyant ; les éducateurs à qui j'ai pu parler m'ont dit que c'est beaucoup de boulot pour faire comprendre à des mineurs qui ont violé qu'ils ont violé.
      (je ne les excuse pas du tout que cela soit clair ; je dis simplement qu'on en est encore malheureusement là).

      • Dans ce cas, est-ce qu'il n'y aurait pas un problème d'empathie, de façon beaucoup plus générale ?
        J'veux dire, quand on couche avec quelqu'un, c'est difficile d'ignorer ses réactions, même si l'on n'est pas amoureux...Enfin, je crois que le sujet me dépasse un peu pour l'instant.

        Quand au premier point, ce cliché est assez dévastateur. Dans un SLG (Salut les Geeks, une émission YouTube très regardée par les jeunes) récent, l'auteur a voulu prendre position contre le "viol doux" prôné par un adolescent, qui comparait ça au "mari qui baise sa femme par surprise". Du coup, SLG a voulu bien faire en disant que le viol c'était pas bien, et que sauter sur une inconnu c'était pas pareil que sur son épouse...J'ai trouvé ça d'une maladresse assez effrayante.

        • d'empathie ou de manque cruel de connaissances des réactions humaines.
          une éduc m'avait parlé d'un gamin dont elle s'occupait qui avait participé à un viol collectif. il avait qq chose comme 11 ans. déjà il y avait clairement participé pour ne pas passer pour "un pd" devant les autres. il n'avait pas envie de sexe, n'en avait pas l'âge, bref (je dis "sexe" car pour lui c'était du sexe). l'educ avait beaucoup de difficultés à lui faire comprendre qu'il y avait viol ; la victime était apparemment entrée en sideration et avait donc fermé les yeux er attendu que cela se termine. pour lui elle était donc consentante (et il ne se cherchait pas des cieconstances atténuantes vu qu'il estimait n'avoir rien fait de mal).
          oui tu vois avec l'exemple de SLG que eux mêmes véhiculent l'idée du viol doux/viol dur. il y aurait des viols plus graves que d'autres, des viols qui n'en sont pas, des viols un peu sympas.

          • Certains commentaires sous tes articles sur le viol venant de personnes eduquees proclamaient que puisque la loi ne pouvait recouvrir certains cas ou qu'on ne pouvait pas les juger DONC ils n'existaient pas, ce n'etaient pas des viols. Et il y a le meme probleme survplein de sujet et c'est limite si finalement les "denonceurs" ne sont pas mis au ban des accuses pour se defendre de ne pas vouloir censurer ou d'imposer la bien-pensance.
            Comment definir une morale commune sans pouvoir la définir precisement dans un cadre legislatif? L'option americaine d'accorder une grande importance a la jurisprudence faite par des juges elus permet de resoudre ce probleme parfois ou parfois d'etre encore pire.

        • C'est de mauvaise foi il détaille ensuite en parlant du jeu de rôle qu'il peut y avoir entre un couple qui se connait bien et qui n'a fondamentalement rien à voir avec ce qu'il peut se passer avec une inconnue, ou pendant un viol conjugal.

          • Non, à ce moment là il s'exprimait sur le fantasme de viol, pas sur la question du consentement entre personnes mariées. Ces deux notions n'ont pas grand chose à voir, ne jouant ni sur les mêmes mécanismes, ni sur les mêmes émotions. Je sais bien que SLG n'a pas vocation à dispenser des cours d'éducation sexuelle, mais sur ce point, j'aurais aimé qu'il formule ses idées autrement, juste en précisant que le mari qui "baise sa femme par surprise" ça pouvait aussi constituer un viol, ce qui tient en une phrase et permet d'éclairer la lanterne de tous les 12-18 ans qui suivent l'émission.

    • "selon quelle logique le détenu devrait-il être entretenu par ladite société ? Ils pourraient continuer à en faire partie en travaillant pour payer leur peine, sans abandonner la mise à l'écart carcérale."

      J'avoue que je ne suis pas spécialiste sur la question, mais depuis quelques temps, j'entends beaucoup parler de ce qu'on appelle Prison Industrial Complex aux USA, où précisément les détenus travaillent, et cela est justement un gros problème : la prison devient un système juteux, il devient rentable d'emprisonner un maximum de personnes car cela fournit une main d’œuvre peu coûteuse et dont tout le monde se fout des conditions de travail. Cela est évidemment complètement lié au racisme - ce sont des hommes noirs jeunes qui sont les parfaites cibles de ce système.

      C'est comme ça qu'on se retrouve avec un juge qui VEND l'emprisonnement de jeunes (oui, vous avez bien lu : lien ici http://govtslaves.info/pennsylvania-judge-sentenced-28-years-selling-kids-prison-system/).

      Donc justement, ce genre de mesures, ça existe, et plutôt pour le pire que pour le meilleur quand c'est couplé au racisme et au capitalisme... J'avais lu quelque part que la Constitution Américaine interdit l'esclavage... sauf dans le cas de la prison ("except as a punishment for crime whereof the party shall have been duly convicted"). Quand on voit les personnes concernées, ça fait effectivement réfléchir...

      Et justement, je n'ai entendu parler de tout ça que récemment, et je me demande si des choses similaires existent (ou pourraient exister) en France ?

      • Dans mon idée le but ne serait pas de faire du chiffre, juste de payer les frais d'hébergement des détenus tout en les faisant participer à des travaux d'intérêt général, pour qu'ils soient connectés au monde de façon positive ^^

        Mais ça ne m'étonne pas que certains systèmes en aient profité. Merci pour le lien, je vais voir ça 🙂

      • Le problème des États-Unis, et ce n’est pas exclusif à leur république, est d’avoir trop de lois, et trop de lois absurdes, qui permettent d’emprisonner n’importe qui pour n’importe quelle raison. Sans être nécessairement raciste, l’application de lois idiotes profite bien aux racistes de tous horizons : ce qu’ils appellent la « guerre contre la drogue » a plutôt l’air de servir à emprisonner les jeunes noirs des banlieues pour des « crimes » tels que la possession d’une substance prohibée, les arrachant à leur famille et souvent à leurs enfants, et à rendre le commerce de ces substances prohibées inutilement violent et peu sûr pour les consommateurs qui doivent compter sur un marché noir pour s’approvisionner.

        Une majorité de la population carcérale aux États-Unis pourrait être dite « de couleur » : noirs et hispanos. Il me semble, si mes souvenirs sont exacts, qu’une immense majorité de leur population carcérale provient de la « guerre contre la drogue ». Cet emprisonnement pour ce que la loi décide être un crime, sans que quelconque violence soit commise, et cette séquestration d’individus qui ne sont pas nécessairement l’incarnation qu’on se fait du trancheur de jugulaire dans les allées sombres parmi ceux qui le sont… Ou des violeurs homosexuels psychopathes… Ou des malades mentaux à qui on n’accorde pas de soins appropriés et qu’on préfère abandonner là…

        La prison aux États-Unis, c’est à peu près aussi intelligent et stable que de secouer une bouteille pleine de nitroglycérine dans un musée du cristal.

        En dehors même du système carcéral, le fait que l’endroit devienne soumis aux caprices d’un État policier encore plus effrayant qu’il y a 20 ans avec la para-militarisation de leurs forces de poilce, qui intervient avec un véhicule blindé au moindre délit pour être sûr de gaspiller un maximum de leur budget, ou qui tue des innocents sans risque de répercussion autre qu’un congé payé… Eh bien… Ça m’inquiète un peu pour l’humanité en général, de telles horreurs.

  7. Je me suis assez penchee sur le sujet de l'alternative à la prison notamment dans d'autres pays qui ont eu des experiences tres concluantes notamment pour kes agresseurs sexuels. On est d'accord que les racises et les categories socio-professionnelles defavorisees sont surrepresentes dans les condamnations (et pas dans les delits et crimes distinction très importante). Donc effectivement on peut eduquer, re-eduquer, re-inserer au motif qu'"ils" ne savaient pas, ne se rendaient pas compte mais au final est-ce que ce n'est pas prendre un postulat raciste et anti-pauvre puisque dans ce cas là on en revient à nier (encore plus) les crimes et delits des cols blancs? Certes ils vivent aussi dans notre societe patriarcale mais où est-ce qu'on met le curseur de qui doit savoir et qui n'a pas pu savoir?( Et leurs fils font de tres bonnes etudes pas de souci pour eux). Tout le monde est dit egal devant la loi on sait que c'est faux car certains la connaissent moins que d'autres au contraire d'autres connaissent très bien comment t echapper, donc au final meme si cela reste une mauvaise solution, le critere du choix d'avoir fait sciemment mal et donc d'etre puni me parait la moins pire solution. Parce qu'au final fort heureusement les racises et les plus pauvres delinquants restent une minorite donc les autres ont bien su déterminer ce qui etait le bien et le mal, ca serait injuste envers eux de ne faire comme si le choix n'existait pas. Et des etudes sociologiques recentes ont mis en avant qu'il y avait une nette correlation entre sentiment d'impunite morale et richesse...le fait d'avoir choisi ne recouvre donc pas tous les cas mais ca serait la moins pire solution...
    Mais effectivement il y a prison et prison, on doit quand meme eduquer reinserer faire vivre decemment tout en le faisant accepter au reste de la societe (il y a quelquechose de moralement magnifique mais en meme profondemlent injuste que des retrautes japonnais commettent expres des crimes pour aller en prison où ils auront de meilleures conditions de vie que dans la societe civile....)

  8. [...] Je suis en général très réservée face aux féministes qui appellent au durcissement des peines de prison, en particulier pour le viol, et pour dire vrai, je suis réticente tout court au durcissement des peines de prison, voire à la prison tout court.Essayons de poser les choses. ...  [...]

  9. Votre billet est un peu court et peu étayé (je débarque sur le blog) mais sur le fond je vois... la peine : celle d'une société où il serait "bon" d'éduquer, de prévenir, de faire réfléchir plutôt que de sanctionner, subir cette violence de part en part. Celle de l'homme sur lui-même, celle de l'homme sur l'autre.

    Cela m'évoque un autre article sur les enfants soldats et tout le travail d'un homme pour les réintégrer adultes dans leur humanité malgré toutes les défaillances de leurs existences meurtrières et pourtant liées à un manque de "repères" dés leur plus jeune âge.

    Entre porter plainte, se taire, subir, pleurer dans le noir silence, reproduire les erreurs, s'enfermer dans sa propre inexistence douloureuse.
    Ou alors prendre sur soi d'expliquer à ses proches, à la société, et à défaut de les convaincre, tenter de comprendre et modifier les causes profondes. C'est ce dernier choix en étant moi-même femme et "victime" que je trouve le plus réconfortant et re-constructeur.

  10. "Boys will be boys" je l'entend tellement celle là x) en tant que prof en formation en secondaire en Écosse on a des cours sur le genre et l'impact sur la scolarité. Les Ecossais ont tout compris : traiter différemment les garçons et les filles est nocif, l'idée de valoriser la virilité des garçons est nocif, les stratégies punitives n'apportent rien... Tout ça est acquis, mais les changements sont lents.

    J'essaye d'apporter ma pierre à l'édifice en parlementant tranquillement avec un élève "à problème" et j'essaye de les valoriser le plus possible dès qu'ils ont un comportement "approprié" (on dispute souvent les enfants qui se comportent pas... Mais prend-on le temps de récompenser les élèves qui se comportent comme on aimerait qu'ils se comportent ?) bref, gros problème mais pas insurmontable (optimiste ?) De plus, ayant bossé en prison, les conditions sont révoltantes, comment un individus qui vient d'être méprisé et traité comme un animal veut avoir envie de participer positivement à la société qui l'a envoyé là ? L'éducation, l'information, la réinsertion... Va bien falloir commencer ce chantier :/

  11. Je lis tous les articles qui me tombent sous la main sur le sujet (pour essayer de décider si oui ou non je vais porter plainte) et je suis un peu déçue par cet article, parce que j'ai l'impression qu'on oublie que le viol (et a fortiori le viol conjugal) sont toujours très mal reconnus comme des crimes, comme étant graves et forts de conséquences. Mettre les violeurs en prison, les considérer "comme des criminels", c'est un pas important pour changer les mentalités. Le jour où on aura entièrement remis en cause le système judiciaire, se posera la question du sort des violeurs, mais je pense qu'il faut voir les deux choses séparément : le "ici et maintenant" et le "après la révolution".
    Ici et maintenant, mettre le violeur en prison, c'est le mettre à distance de sa victime, c'est la protéger, la reconnaître comme victime et reconnaître que le/les viol(s) qu'elle a subi sont graves.
    Alors oui, 17% des prisonniers ont été condamnés pour viols et agressions sexuelles, mais on met 1 100 violeurs en prison chaque année en France, un nombre franchement ridicule quand on le compare au nombre de femmes violées chaque année.
    J'ai plutôt tendance à trouver cela attristant, à tout dire....

    • Je ne sais pas si ça peut vous aider, mais il y a quelques éléments assez bons à savoir au sujet de la plainte : d'une, un dépôt de plainte, même classé sans suite, reste archivé et peut donc servir à des affaires ultérieures; un policier n'a pas le droit de refuser d'enregistrer votre plainte et se doit d'être courtois; une expertise psychiatrique sera pratiquée sur vous (rien de sordide, c'est très neutre); une fois que tous les témoins sont interrogés, c'est l'attente, et sa longueur dépend de la complexité des faits (s'ils sont récents et n'impliquent que des majeurs, c'est en général le plus bref, s'il remontent à loin avec des circonstances aggravantes, là, ça peut être très long) et du nombre de juridictions impliquées; et l'impact psychologique d'une plainte est assez difficile à anticiper (certaines ressentent un soulagement immédiat, d'autre non - personnellement, je l'ai fait par sentiment de responsabilité, et, après une période de dépression, j'ai fini par me sentir beaucoup mieux, avec l'impression d'avoir fait mon devoir, et d'avoir été forte, en sachant que le procès n'a pas encore eu lieu, l'enquête dure depuis 10 mois. Mais chacune réagit à sa manière,).

      Personnellement, je suis assez partisane de la plainte pour faire évoluer les choses, mais il est tout à fait compréhensible de s'en abstenir, compte tenu de la pression qu'elle représente.

      Voilà-voilà, et désolée si vous aviez déjà entendu tout ça ^^

      • Pour moi, la plainte s'est très mal passée. Les policiers n'ont pas été "courtois", mais traumatisants, au point que je laisse tomber, entre autres.

    • mimi ; la justice pénale n'est pas là pour juger un crime en fonction des conséquences potentielles sur la victime. Comment juger des conséquences ?
      est ce que celui qui a violé une femme qui se retrouve sans SPT mérite moins d'années de prison que celui qui viole une femme qui fait ensuite une TS ?
      est ce que la prison est le seul moyen de déterminer qu'un crime est grave ?
      les conséquences d'un viol peuvent être multiples, durer des années, nécessiter de longues années de psy ; quelle sentence serait à l'aune de cette souffrance ?
      est ce que la prison est la seule manière de reconnaitre quelqu'un comme victime ?
      personnellement le procès me semble un bon moyen de poser les choses ; la peine en est une autre.

      il ne s'agit pas de se préoccuper des violeurs, il s'agit de savoir si on a envie de prevenir la recidive en matière de crimes sexuels par exemple.
      on met des gens en prison sans aucun suivi psy par exemple. ainsi Schembri, qu'il fasse sa peine ou non, n'a aucune obligation de suivi psy (de toutes façons vu qu'on n'a pas les moyens d'en faire..). les mineurs mis en prison voient très peu leur educateur qui ne peuvent absolument pas bosser avec eux sur leur crime.
      l'éloigner de la victime oui. le préparer à une sortie QUI AURA LIEU TOT OU TORT et tout faire pour éviter qu'il ne recommence c'est mieux.
      et c'est tout le sens de mon texte.

  12. Ca va être du "de mémoire" donc il va y avoir des approximations.
    En France, la justice est toujours un problème de société, pas entre individus. Quand un délit/crime est jugé, on ne juge pas la personne pour le mal qu'il a fait à quelqu'un d'autre, mais pour avoir brisé les règles de la société, et donc remis en cause l'Ordre. Ca écarte pas mal les victimes, mais ça évite le côté vengeance/revanche.

    La prison, c'est la société qui met donc à l'écart un de ses membres qui a refusé/brisé l'ordre établit, pour qu'il paye pour avoir "trahi" la société, et se rachete auprès de celle-ci. Donc en théorie une fois sorti de prison on devrait pas casser les pieds aux ex-taulards.

    Depuis on a créé le concept flou de "préjudice moral" pour prendre en compte les victimes, je dis flou car si on compare ce que touche une personne qui perd une jambe et les millions de Tapie pour "préjudice moral", ben...

  13. Les attacher à une chaise et les forcer à regarder toutes les œuvres féministes en boucle ?

    Sinon, il semblerait que le seul état des prisons soit un facteur important pour prévenir la récidive (de mémoire, en Norvège : 20%, contre 60% en France). Un exemple Norvège/USA : http://6mois.fr/Le-taux-de-recidive-est-de-16-a?lang=fr

  14. "Quel est le but de la peine de prison ?"

    Un des rôles de la peine de prison est d'écarter de la population des individus dangereux, un autre rôle est de dissuader les individus suffisamment intelligents pour comprendre qu'ils risquent d'être pris et condamnés.

    "Quand j'entends que des mineurs ont été condamnés à X années pour un viol collectif et que leur avocat se dit inquiet car pas un n'a compris le verdict ni l'acte commis"

    Vous avez parfaitement raison d'attirer l'attention sur ces individus qui ne comprennent même pas leur délit ou crime. En effet, le rôle "dissuasif" que j'évoquais plus haut ne s'applique évidemment pas à ceux qui ne voient même pas pourquoi ils seraient condamnés. La dissuasion ne s'adresse qu'à ceux ayant suffisamment d'esprit pour comprendre qu'ils risquent d'être pris et condamnés.

    Je propose donc d'administrer une injection létale à ceux qui sont trop stupides pour comprendre cela. Ce serait plus économique que la prison, plus sûr pour les gardiens de prison et la population.

    • et puis la peine de mort c'est dissuasif.
      ah non merde.
      mais alors deux questions :
      - sachant qu'un paquet de gens viennent sur mon blog pour m'expliquer qu'un viol n'est pas tout à fait un viol surtout si la femme est moche/jolie/grosse/pute/voilée etc etc, est ce qu'on doit les tuer aussi ?
      - sachant que beaucoup risquent de mentir et de faire croire qu'ils ont compris pour éviter de crever est ce qu'on ne ferait pas mieux de tous les tuer preventivement ?

      • "et puis la peine de mort c'est dissuasif"

        Oh, seulement pour les gens qui peuvent se contrôler, et imaginer qu'ils seront pris et condamnés. Donc pas les gens trop stupides pour cela, ou trop sûrs de leur immunité (pensons à un politicien célèbre).

        "sachant qu'un paquet de gens viennent sur mon blog pour m'expliquer qu'un viol n'est pas tout à fait un viol surtout si la femme est moche/jolie/grosse/pute/voilée etc etc, est ce qu'on doit les tuer aussi ?"

        S'ils commettent des viols, pourquoi pas? Un type qui en est à son deuxième viol, à qui on a expliqué ce que c'était, et qui recommence... il ne se contrôle pas, ou il ne voit pas le problème à violer. Donc il recommencera. Comme on ne va pas l'enfermer en prison ad vitam aeternam, autant le piquer.

        "sachant que beaucoup risquent de mentir et de faire croire qu'ils ont compris pour éviter de crever est ce qu'on ne ferait pas mieux de tous les tuer preventivement"

        La récidive est un bon indice, qu'en pensez-vous? Quand un type se fait gauler, expliquer en quoi ce qu'il a fait est mal, dit "oui oui" et recommence, c'est qu'il est sournois et menteur. Il recommencera.

        Mais bon, sur votre blog, quelle est la part de ceux qui pensent réellement qu'on peut violer parce qu'une femme est moche/grosse/violée, et ceux qui vous racontent ce genre de trucs pour vous faire grimper aux rideaux? Parce que les vrais gros cons bouchés à l'émeri, à mon avis ne vont pas sur des blogs féministes.

  15. Avant la prison, il y a d'abord la condamnation. Ni l'article ni les réactions n'en parlent beaucoup. C'est le premier but de nos procédures de justice, non ? C'est la société qui applique ses règles de 'bien' et 'mal' et son tarif, et qui revivifie les règles sociales par ce rituel. Dans l'application des peines, il y a toutes sortes de moyens, dont l'amende, la prison avec SURSIS (cad la menace en cas de récidive), enfin la prison. Et la loi "d'application des peines" prévoit alors une libération anticipée avec conditions de suivi, pour autant qu'il y ait bonne conduite. Donc, en principe, il y a condamnation ET main tendue vers la réintégration. La prison, c'est le bâton à côté de la carotte. Voilà le principe, si on veut parler de la prison en général. Ne voir que la prison comme action de la société, c'est caricaturer.
    Maintenant, dans la réalité, il y a concrètement machisme et racisme dans la société (donc dans la justice répressive). La société progresse (notamment par ces règles s'appliquant à la police recevant les plaintes). Mais l'égalité progressive, ce n'est pas encore le renversement des discriminations et de la domination. Les symboles et injonctions restent actifs. Cette idée que la condamnation n'est déjà pas comprise me parait plus importante que la question de la lourdeur des peines de prison. La prison est un modèle de société hypermachiste. Enfin, c'est ce que je lis.

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